LES MONUMENTS DE L'EAU: le réseau hydraulique

Comment l'eau était-elle accessible?

collecteur dallé au milieu du decumanus maximus

plaque d'égout à l'entrée sud du forum

L'alimentation en eau de Volubilis était assurée par les nombreuses sources qui jaillissent des pentes du Zerhoun et par les oueds Khoumane et Fertassa. Des puits et citernes devaient aussi être utilisés par des particuliers, mais leurs vestiges sont rares sur le site. L'essor de la ville et la romanisation progressive du mode de vie ont imposé la mise en place d'un réseau hydraulique complexe. Un aqudecuc construit vers la fin du IIe siècle captait les eaux d'une source située à un kilomètre environ à l'est de la ville. Enterré sur la plus grande partie de son parcours, il émergeait dans un decumanus secondaire et se subdivisait ensuite en plusieurs branches. La branche principale, la plus visible, aboutissait à deux fontaines publiques. Une autre conduite en plomb captait aussi les eaux d'une autre source.

Ces conduites remplissaient de petites citernes qui régulaient le débit de l'eau. A partir de ces citernes, des canalisations de terre cuite ou des tuyaux de plomb emboités ou soudés alimentaient maisons et monuments publics. A l'entrée des maisons, des robinets de bronze permettaient de contrôler la quantité d'eau nécessaire à chaque foyer. Ils déterminaient aussi le montant des taxes à payer aux autorités municipales.

Il fallait aussi assurer l'évacuation des eaux de pluie, des eaux usées, des trop-pleins des bassins et des fontaines. Au milieu du decumanus maximus, un collecteur central profond de plus d'un mètre et couvert de grandes dalles de calcaire entraînait les eaux d'infiltration et les eaux usées. Il recevait également les eaux de deux fontaines publiques, et se jetait plus bas dans l'oued Khoumane. Un autre égout longeait un decumanus secondaire. L'oued Fertassa évacuait aussi les eaux des maisons les plus proches et des thermes du Nord.

Le bon fonctionnement de ce réseau hydraulique dépendait de l'efficacité des institutions municipales. Après le retrait romain de 285, celles-ci ont peu à peu décliné, et l'aqueduc a été abandonné. Le circuit de l'eau n'a plus été assuré. C'est aussi tout un mode de vie hérité de la romanisation qui a en même temps disparu. La ville tardive s'est alors repliée vers l'oued Khoumane, devenu la source d'eau la plus accessible.

cliquez pour en savoir + : le circuit de l'eau à Volubilis (PDF 142 ko)

LES MONUMENTS DE L'EAU : les thermes

Comment l'eau a-t-elle contribué à répandre le mode de vie romain?

fontaine publique du decumanus maximus

piscine de la palestre (thermes du Nord)

palestre: cour voisine des thermes, destinée aux exercices physiques

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le cycle du bain

Les latrines, les fontaines et les thermes publics étaient grands consommateurs d'eau. Les latrines (celles des thermes du Nord par exemple) n'ont laissé que leurs rigoles en U. En l'absence de maçonnerie, on peut penser que leurs usagers utilisaient des sièges de bois. Les fontaines comportaient un bassin de décantation qui filtrait l'eau de l'aqueduc. Elles jouaient aussi de rôle de réservoir et alimentaient des réseaux secondaires. Leur flot se déversait dans les collecteurs et entraînait naturellement les eaux usées vers l'oued.

Ce sont surtout les vestiges de 4 thermes publics qui témoignent du rôle que jouait l'eau dans la civilisation romaine. Les thermes du Nord, les plus vastes, ont été construits entre 60 et 80. Ils comportent une palestre à ciel ouvert de plus de 300 m² pourvue d'une piscine spacieuse. Leurs principes de fonctionnement s'apparentent à ceux des thermes romains, même si leurs dimensions sont plus réduites. A la différence des thermes impériaux à itinéraire symétrique, qui permettaient d'accueillir simultanément hommes et femmes, les thermes volubilitains sont conçus selon un axe unique qui obligeait le baigneur à revenir sur ses pas pour terminer le cycle du bain.
Le principe du bain était basé sur le contraste du chaud et du froid. Les salles se succédaient selon leur température interne, de la plus froide à la plus chaude. Le baigneur se déshabillait d'abord dans un vestiaire muni de banquettes. Il traversait la salle froide pour se rendre dans la salle tiède où il pouvait s'échauffer. Puis il entrait dans la salle chaude pour transpirer. Il s'enduisait le corps d'huile et se nettoyait la peau à l'aide de strigiles, sortes de racloirs de bronze.

Ensuite, chaussé de sandales de bois pour se ptrotéger du sol brûlant, il rejoignait la salle du bain chaud, directement chauffée par les foyers du sous-sol. Là, des baignoires et des vasques lui permettaient de s'immerger ou de s'asperger d'eau chaude. Il revenait ensuite sur ses pas, s'arrêtant parfois dans la salle tiède , et se trempait dans la piscine de la salle froide, pour raffermir son corps selon les préceptes de l'époque.

Les thermes que l'on fréquentait surtout l'après-midi étaient un lieu de rencontre. On y pratiquait des actvités diverses: lecture, massage, épilation et exercices physiques. La plupart des thermes disposaient de boutiques où l'on vendait boissons et gâteaux. Au IIIe siècle, les grands thermes publics de Volubilis ont été remaniés, en même temps qu'apparaissaient des thermes privés dans les riches demeures patriciennes. La découverte de thermes islamiques dans le quartier sud témoigne de la vitalité de cette institution qui a autant marqué la civilisation romaine que le civilisation islamique. Aujourd'hui, les hammams sont répandus dans tout le monde arabo-musulman.

LES MONUMENTS DE L'EAU : les hypocaustes

Comment chauffait-on les thermes?

hypocaustes de la maison d'Orphée. En jaune, le parcours de l'air chaud dans les sous-sols et les tubuli.

détail de la suspensura supportée
par des pilettes de briques (maison d'Orphée)

hypocaustes: d'un mot grec signifiant "chauffer par-dessous"

suspensura: sol foulé par les baigneurs au-dessus des hypocaustes

Pour chauffer les salles des thermes publics ou privés, on utilisait le principe des hypocaustes. Une pièce de service aménagée en contrebas de la rue permettait d'alimenter un ou deux foyers qui envoyaient de l'air chaud dans le sous-sol des pièces à chauffer. Ces foyers étaient constitués d'une voûte allongée faite de briques réfractaires. On les alimentait en bois, charbon, paille ou noyaux d'olives. L'air chaud circulait entre des pilettes de briques disposées à intervalles réguliers sur un sol de carreaux de terre cuite. Elles étaient terminées en voûtes et surmontées de carreaux de terre réfractaire pour mieux supporter la suspensura. Celle-ci était faite de mortier et de tuileau, et la partie supérieure foulée par les baigneurs était pavée de dalles ou de mosaïques.

Au-dessus du foyer, on plaçait une chaudière de bronze. Grâce à un jeu de tuyaux et de robinets, celle-ci alimentait en eau chaude les bassins et vasques de la salle du dessus. L'air chaud du foyer circulait aussi dans les murs des pièces en remontant dans des briques creuses ou des tubes de terre cuite (les tubuli) encastrés dans une double cloison. La ventilation et l'évacuation des fumées se faisaient par des cheminées dont on n'a pas retrouvé de traces. Les hypocaustes permettaient ainsi de chauffer efficacement des pièces d'habitation durant l'hiver.